Après avoir constaté l’ampleur des dégâts auprès de 13 banques, les seniors leur décerneront des prix lors de la cérémonie « Balance ta banque » et imagineront des solutions pour ne pas grossir les rangs des exclu·e·s bancaires.

En 2019, seuls 58% des Wallon·ne·s âgé·e·s de 60 à 69 ans effectuaient des opérations bancaires ou de bourse par internet. Chez les plus de 70 ans, ce pourcentage chute à 27%. Le baromètre 2019 de la maturité numérique des citoyen·ne·s wallon·ne·s (Agence du Numérique) le prouve : si les banques passent au tout digital, les client·e·s, surtout âgé·e·s, ne sont pas toujours prêt·e·s à suivre ce changement.

La fracture numérique laisse encore trop de personnes dans l’oubli. Dans le dernier rapport sur l’inclusion financière de Financité, les témoignages recueillis soulignaient très clairement la perte d’autonomie des plus de 65 ans face à la digitalisation accrue du secteur financier.

Financité, Énéo et Espace Seniors ont alors décidé de réagir et de rassembler leurs forces pour exiger des solutions auprès des banques et des pouvoirs publics. La première étape, en juin, a constitué à envoyer un questionnaire aux banques pour connaître précisément leur position en matière d’accessibilité bancaire et les mesures d’accompagnement mises en place pour les client·e·s de plus de 65 ans.

13 banques offrant des comptes à vue en Belgique ont été sondées : Argenta, Axa Banque, Belfius, BNP Paribas Fortis, Beobank, bpost banque, CBC, CPH, Crelan, Deutsche Bank, ING, KBC et Keytrade. Toutes nous sont revenues, excepté Axa Banque qui a refusé de répondre.

Quelques résultats de l’enquête

	L’enquête révèle que, quelle que soit la banque, plus ou moins 25% de leurs client·e·s ont plus de 65 ans, d’où l’importance de prendre en considération leurs besoins et leurs attentes. Malheureusement, l’enquête montre aussi que ce n’est pas encore le cas pour toutes les banques… Aucune banque n’a d’ailleurs mis en place un service dédié à sa clientèle senior ou à celle qui éprouve des difficultés avec les services en ligne. Si certaines mentionnent qu’elles ont une approche segmentée de leur clientèle, l’argument semble être plus « marketing » qu’autre chose.
	Les tarifs pratiqués sur les opérations hors internet viennent ainsi révéler la non prise en compte d’un public en fracture numérique. Le moindre virement papier peut atteindre 2 euros chez BNP Paribas Fortis et faire effectuer un virement en agence peut coûter 9,68 euros chez ING.
	L’enquête montre cependant que certaines banques ont fait un effort. Les tarifs de Belfius, applicables depuis septembre de cette année, offrent par exemple la gratuité des virements papier et virements manuels en agence ainsi que l’envoi gratuit des extraits de compte pour les titulaires des comptes Comfort, Comfort Red, Comfort Gold et Comfort Platinum pour toutes les personnes ayant plus de 70 ans.

Chez Crelan, certains services sont également gratuits pour les 65 ans et plus : l’envoi des extraits de compte à vue mensuel et bimestriel par voie postale, traitement au guichet d’un virement vers un compte non-Crelan, un ordre de paiement rejeté en raison d’un solde insuffisant n’est pas redevable, etc. KBC prévoit également des virements papier gratuits pour les plus de 65 ans.

Mais en dehors de ces quelques exceptions, l’enquête montre que les personnes âgées sont le plus souvent « punies » de refuser ou de ne pas être capables de passer à l’outil digital.

Quelques avancées timides se dégagent donc dans la tarification. Mais en ce qui concerne l’attention portée aux seniors, tout semble fait pour leur compliquer la vie. Entre 2000 et 2019, on est passé de 12.571 agences à 4.692 en Belgique, soit une diminution de 63 %. Aucune banque ne semble disposer d’informations sur le nombre de leurs client·e·s vivant à plus de 2 km de son agence la plus proche. Cela tendrait à montrer qu’elles ne tiennent pas compte de ce segment de clientèle dans le choix de localisation de leurs agences et distributeurs.

Même constat concernant l’aménagement des espaces de self-banking qui ne tiennent pas compte des difficultés d’accès des personnes âgées. L’absence d’endroit où s’assoir, en faisant la file ou pour effectuer ses virements, est remarquable. ING avoue même : « pour des raisons de sécurité, et pour libérer les appareils Self’Bank aussi vite que possible, aucun appareil n’est équipé de siège. »

Les seniors ont la solution !

Pour établir des solutions adaptées à revendiquer auprès des banques et des pouvoir publics, des groupes de discussion sont organisés par Financité partout à Bruxelles et en Wallonie en octobre. À partir des résultats du questionnaire, les seniors imagineront les mesures à mettre en place afin d’être enfin autonomes dans la gestion des opérations bancaires.

Les groupes de discussions éliront les pires pratiques bancaires sous forme de prix décernés aux banques lors de la cérémonie « Balance ta banque » qui aura lieu en 2021.